L’Arlésienne, dans la nouvelle éponyme d’Alphonse Daudet, est un personnage décrit mais n’apparaissant pas. Les Arlésiennes – les rencontres photographiques de celles que l’on ne voit pas – dévoilent une part d’inconnu avec ses expositions « MONDES » (du 4/7 au 16/8/2020), qui explore le rapport que l’Homme entretient avec la Nature, puis « REVELATIONS » (du 5 au 27/9/2020), qui abordera le corps et la beauté, en lien avec la notion de « soi », la nature, et l’au-delà.

En faisant l’ouverture, l’exposition « MONDES » met ainsi en scène ce monde que l’on habite mais qui parfois aussi nous habite. Un monde que l’homme a surexploité jusqu’à l’extinction d’espèces mais aussi de populations. Un monde qui pourtant recèle encore des merveilles insoupçonnées, pour peu que l’on sache les préserver mais aussi en apprécier la beauté, ce qu’avait à coeur Vincent van Gogh lors de son séjour arlésien (1888-1889), et ce en quoi la photographie trouve tout son sens.
Alors que malgré leur annulation les célèbres Rencontres d’Arles s’associent à la première édition d’Agir pour le Vivant, grand festival imaginé par les éditions Actes Sud, qui entend renouveler la grande histoire de la relation de l’homme avec la nature du 24 au 30 août 2020, nous nous réjouissons que l’exposition MONDES des Arlésiennes – les rencontres photographiques de celles que l’on ne voit pas, permette d’explorer ce thème en avant-première.

Lancé le 20 mai, un appel à participation aux Arlésiennes a recueilli en une dizaine de jours près de 40 propositions, dont celles de nombreux Arlésiens témoignant de l’envie d’être acteur et non simple spectateur d’un événement estival consacré à la photographie.

L’appel s’adressait d’une part aux photographes émergents dont le travail « s’inscrit dans l’air du temps » et d’autre part aux photographes possiblement bien établis dont le travail est à caractère social, ou sait faire ressortir l’extraordinaire dans l’ordinaire, ou même dévoile ce qui n’a encore jamais été vu.
Un conseil artistique présidé par l’éminent historien de la photographie Robert Pujade, qui fut pendant plus de 30 ans expert auprès des Rencontres de la photographie d’Arles, aura permis d’identifier quelques « pépites » photographiques dont les travaux sont ici présentés. Parmi les personnes exposées, cinq sont Arlésiennes et cinq autres n’avaient jusqu’à présent jamais montré publiquement leur travail.

Née et résidant à Arles, Régine Chiffe présente trois images de sa série « Âmes Arboricoles » ; des images d’écorces d’où elle fait ressortir « les énergies du vivant ». Des oeuvres à la pâte très « van goghienne », tant dans le choix des couleurs que de part l’effet de matière qu’elles véhiculent.

Ayant fait le choix de vivre en Ardèche pour s’ancrer dans une nature « puissante et libre », Isabelle Liv, véritable charbon ardent de la photographie, nous offre à voir des cieux habités et des tournesols ; des images parfois très noires mais néanmoins guidées vers la lumière.

Montpelliérain, architecte de profession, Sébastien Soulez-Larivière expose des « sylvographies » résultant d’un procédé de transfert manuel de photographies du papier au bois ; des oeuvres tirant parti de l’essence et du veinage de la pièce de bois sélectionnée et qui, dans leur ensemble, questionnent la place de l’homme dans le monde.

Basé en Italie mais francophone, Marco Ambrosi est un photographe particulièrement humaniste ; d’une monstrueuse beauté, sa série de portraits à la manière d’Arcimboldo a été réalisée lors d’ateliers photographiques menés en milieu pénitentiaire.

Arlésien, Antoine Turco est un pigeon voyageur que ses ailes auront porté jusqu’au Costa Rica et en Thaïlande, aux détours des chemins. Ses photographies documentent l’impact de la vie humaine et de la pollution sur la nature autant qu’elles surprennent.

Arlésien, autrefois ferronier et jusqu’il y a peu animateur d’ateliers de créativité, Christian Soupène présente sur une plaque de métal oxydé des photographies prises dans un coin de « la Petite Camargue » (l’étang de Berre) ; le fruit d’une réflexion sur l’homme et la transformation de la matière, son impact et les traces qu’il en laisse dans son environnement.

Basée à Londres, Florence Gomez a longtemps vécu en Chine. Prises en 2009, ses photographies documentent le quotidien des Ouïgours, une ethnie musulmane vivant dans le Nord-Ouest de la Chine et sous le coup d’une politique de « sinisation » de la part de Pékin. Des images d’une communauté qu’il est très difficile de documenter, ce qui témoigne du fait que l’homme peut aussi être un « loup pour l’homme ».

Arlésienne, Yo Vicente a longtemps vécu au Panama. Elle présente ici une série prise en 2003 et qui documente la tradition de peinture corporelle des Indiens Embera, qui vivent dans la jungle panaméenne en communion avec la nature.

Norvégienne, Helén Petersen est fascinée par le monde sous-marin. Prises en 2018, sa série « Space Below » découle de sa collaboration en qualité de photographe avec l’Institut de Recherche Marine de Norvège. Des images prises à l’aide d’un microscope et d’un appareil photo où le vivant se révèle être un joyau.

Arlésien, docteur en sciences de la vie, Jérôme Courboulès expose une série de photographies sous-marines prises aux Comores entre 2016 et 2019 alors qu’il y dirigeait un projet de lutte contre le changement climatique. Prises à l’aide d’un appareil étanche permettant de photographier ce que l’on ne voit pas à l’oeil nu, ses images révèlent des mondes oniriques dignes des séries de science-fiction et nous invitent à l’émerveillement.

Enfin, dans le droit fil de ce premier opus et en guise d’introduction au second, « REVELATIONS », l’arlésien Robert Pujade, par ailleurs photographe et philosophe, nous fait le plaisir de nous confier un « paysage au nu » qui témoigne de la possible présence de la beauté en toute chose.

Les Arlésiennes sont portées par l’association Mia Casa qui « cultive l’espoir que l’art et la culture ouvrent d’autres portes » en soulignant la situation particulière des familles mono-parentales.
Voir miacasa-arles.com

Les oeuvres présentées sont proposées à la vente, en soutient des artistes et de l’action de cette association.

« Il n’y a rien de plus réellement artistique que d’aimer les gens. »
Vincent van Gogh

Commissariat : Robert Pujade, Kharma Chan, Delphine Dewulf
Production : association Mia Casa

 

Conception graphique : Diana Hajji avec Kharma Chan et Delphine Dewulf